Parc du centre de Poble Nou vs. Parc Diagonal Mar
Descriptions et comparaisons
Nous aimons traverser lors de nos visites guidées à vélo, les quartiers de Poble Nou et de Diagonal Mar. Il s’agit de deux quartiers de l’arrondissement de Sant Martí qui s’étendent de la mer jusqu’à l’avenue Diagonal. Les contrastes y sont importants: s’y côtoient les vestiges industriels de la “Manchester catalane” avec ses cheminées et ses vieilles usines et les quartiers ultra-modernes du 22@ et de Diagonal Mar.
Ces quartiers sont facilement “visitables” à vélo. De nombreuses pistes cyclables les parcourent et le petit centre historique de Poble Nou est particulièrement agréable à visiter à deux roues.
Deux parcs s’y trouvent: le parc Central de Poble Nou qui couronne le quartier et le parc de Diagonal Mar qui le chausse! Ces deux espaces verts représentent bien la tendance actuelle des parcs urbains: la recherche de l’alliance entre technologie et romantisme.
Voici donc une description rapide de ces deux espaces, leurs ressemblances et leurs différences, ainsi que quelques anecdotes pour pimenter le tout.
Conçus par deux architectes de renom
Moderne dans son tracé, le parc de Diagonal Mar a été conçu en 2002 par Enric Miralles (1955-2000), célèbre architecte catalan, père de nombreux édifices (Parlement d’Édimbourg, Musée d’Art Moderne d’Helsinki) et par son épouse, Benedetta Tagliabue.
Celui du Poble Nou a été réalisé par l’architecte français Jean Nouvel (né en 1945), célèbre pour son internationalisme: Tour Agbar de Barcelone, édifice Dentsu de Tokyo, Les Gazomètres de Vienne, entre autres.
Les oeuvres de ces deux grands architectes sont principalement reconnues pour leur côté artistique (édifices colorés) et pour l’utilisation de matériaux nouveaux, écologiques (jardin vertical etc…).
Les contrastes entre le naturel et l’urbain, l’espace vert et le gris du ciment ou du métal des édifices alentours, sont très prononcés dans ces deux parcs.
Parcs composés de différents espaces
Ces 2 parcs sont divisés en plusieurs espaces indépendants en fonction du découpage des rues.
Le parc de Diagonal Mar
L’ensemble du parc est composé par deux grands espaces séparés par une rue. Chaque espace étant lui-même divisé en zones.
Aux dires de Mirailles, chaque zone correspond à un âge, une étape de la vie de l’homme.
On peut donc distinguer 7 zones:
Les ramifications de la place centrale: allées qui partent de la ville ou du littoral et débouchent sur la place centrale, près du lac.
Les allées de l’enfance -zone de jeux: Promenades qui mènent aux zones de jeux pour les plus petits, composées de bac à sable et chevaux de bois, le tout entouré d’eau.La rue Taulat: Le parc est coupé en deux par cette rue, ce qui donne une perspective intéressante sur le nouveau quartier moderne de Diagonal Mar.La passerelle du lac: passerelle qui zigzague au-dessus du bassin central et permet d’apprécier l’étendue du parc.La montagne magique: zone de jeux aménagée pour les enfants, avec des toboggans aux formes sinueuses, sur une petite colline. Juste derrière se trouve la maison du jardinier, construite sous la terre, telle une maison de hobbit.
Le lac: grand bassin surplombé de structures en métal qui servent de brumisateurs. Il abrite une faune et une flore typiques des régions Méditerranéennes.
La place centrale: Lieux de rencontre pour les voisins du quartier, cette esplanade est décorée avec des énormes pots suspendus à une structure tubulaire aérienne. La réalisation du Parc de Diagonal Mar a duré de 1995 à 2002 et il s’étend sur 14,31 Ha, sur le terrain d’une ancienne fabrique de fonte et moulage en acier (Macosa).
Le parc du Centre de Poble Nou
Il n’occupe que 5,5 Ha. et a été bâti sur les anciennes voies du tramway et le terrain de l’immense usine métallurgique Can Ricart. Il fut inauguré en 2008 et se divise en 3 parcs composés de différents espaces.
Dans la partie Centrale on peut distinguer:
-La rampe lunaire qui abrite la Déchèterie Centrale est constituée d’une pente à 45º recouverte de roches volcaniques et de petits palmiers des îles Canaris.
–La place de la Sardane est une grande place ronde et centrale qui permet aux voisins de se retrouver pendant les fêtes du quartier. (La sardane est une danse traditionnelle catalane, une ronde fermée où les danseurs se tiennent par la main et dansent au rythme d’un orchestre appelé La Cobla.)
-L’île et sa coupole végétale au milieu de laquelle se dresse une cheminée en briques rouges, typique vestige du passé industriel du quartier.
De l’autre côté de la rue, on trouve:
–La caserne de la guardia urbana et l’ancienne usine métallurgique Can Olivia Artés, restaurée pour y abriter le Musée d’Histoire de la ville. On y trouve aussi un espace aromatique où poussent du jasmin et des belles de nuits.
En face il y a:
–La spirale dénommée aussi le cratère
–La zone de jeux, ornée d’amusantes sculptures métalliques et ses balançoires minimalistes.
DÉVELOPPEMENT DURABLE, PLANTES ET MOBILIERS URBAINS
Ces parcs ont été pensés avec l’idée de développement durable, d’autosuffisance surtout au niveau de l’arrosage (au goutte à goutte) puisque l’eau de pluie est stockée dans les puits souterrains et utilisée pour l’arrosage des parterres.
le parc Central de Poble Nou
Ici, les nappes phréatiques peu profondes ont permis d’y faire pousser de nombreux saules pleureurs, des lianes, et des chèvrefeuilles. Les voûtes végétales et les murs de lierres et autres plantes grimpantes sur les structures câblées, donnent aujourd’hui un aspect très agréable à ses promenades ombragées. Malheureusement, à certains endroits, les plantes ne grimpent pas puisqu’elles brûlent sur les câbles de métal.
Le parc est aussi très critiqué par les jardiniers qui soulignent le côté peu naturel de la croissance forcée des arbres dans une position, des espaces de plantation non-respectés entre chaque arbres et surtout de la difficile manutention et taille des murs grimpants dus au mélange de 5 espèces différentes qui finissent pas s’étouffer les unes et les autres… Bref, le choix peu approprié des différentes espèces rend le coût de la maintenance du parc particulièrement élevé.
Ceci dit, l’architecte Jean Nouvel a rempli sa mission, et le parc est effectivement très agréable en plein été grâce à ses zones ombragées par les treilles de glycines et de chèvrefeuilles.
Ce parc est entouré de ces hauts murs de bougainvilliers qui lui donne un air de paradis caché et seules de petites ouvertures en forme de hublots permettent d’en contempler l’intérieur. Ces murs protègent certainement du bruit qui vient de l’avenue Diagonal. L’accès s’y fait à travers des dômes, inspirés des courbes de Gaudi, dont les portes sont en fer forgé. Des cabanes en bois tressés recouvertes de plantes grimpantes ont elles aussi la forme d’un dôme.
Le mobilier se constitue de quelques chaises futuristes, de lampadaires ronds du même style et de sculptures aériennes. L’ensemble est très agréable et très moderne.
Le parc de Diagonal Mar
Il a, lui, complètement respecté la végétation autochtone du bassin méditerranéen, avec ses nombreux palmiers, acacias et lauriers clairsemés qui lui donne un aspect de jardin plutôt que de parc. De magnifiques parterres de plantes médicinales et aromatiques bordent les sentiers. Le parc est dès lors très agréable sous le soleil d’automne et au printemps…
Dans ce parc, espace ouvert entouré d’une grille forgée ondulante, les bancs de ciment poli aux formes sinueuses sont un endroit parfait pour lézarder et se reposer au soleil. Un hommage à Salvador Dali a été rendu par l’utilisation de papiers publicitaires vitrifiés de célèbres marques de sucettes et chewing-gum (les logos de Chupa-chups et Trident ont été dessinés par Dali) sous forme de mosaïques collées aux énormes vases suspendus.
Il faut ici remarquer que ces pots, très décoratifs, sont un échec quant à leur utilisation: le fait d’être en fer rend impossible la croissance des plantes grimpantes qui devaient former un toit végétal au dessus de la place centrale…
Une critique s’est aussi élevée quant aux murs de contention du bassin et murets qui entourent les terre-pleins: étant formés par des pierres entassées, ils sont un refuge idéal pour les rats qui ont colonisé le parc.
En revanche on peut applaudir la création d’un écosystème naturel qui a permis aux oiseaux migrateurs de venir se reposer dans le bassin du parc.
Très agréables aussi les chaises dessinées par Mirailles pour les Jo’92. Elles se nomment Lungo-mare. Ces grandes chaises-longues ressemblent à un mouchoir froissé et s’adaptent à la courbature du corps.
De nombreuses critiques…oubliées depuis!
Les projets de rénovation et d’agrandissement des deux zones (zone littorale pour le parc de Miralles et quartier administratif 22@ pour celui de Nouvel) ont été l’objet de dures batailles légales entre le voisinage et la mairie de Barcelone.
Diagonal mar…un drôle de quartier sans voisins
Le quartier chic de Diagonal Mar s’est construit dans une zone relativement humble de Barcelone: elle est en effet entourée de La Mina (quartier gitan “défavorisé” comme on dit, constitué de barres, construitent à la fin des années 60 afin de vider les bidonvilles du littoral) et du quartier de Poblenou, quartier prolétaire en pleine gentrification.
C’est à la suite du très polémique Forum des Cultures de 2004 que ce nouveau quartier a surgit des ruines d’anciens hangars, usines textiles et autre vestiges du passé industriel de la zone. A leurs places sont apparus des tours de haut-standing, des hôtels 5 étoiles, un immense centre commercial et des lofts ultra-modernes, évidemment hors de prix pour les habitants du quartier. 15 ans après c’est toujours un quartier fantôme…ce qui illustre assez bien la gravité de la crise immobilière en Espagne.
De plus, le parc en soit est un espace public, géré par la municipalité: jardiniers, entretien des sculptures etc…Par contre, à la tombée de la nuit, le parc ferme au public et devient un espace privé où seuls les résidents des tours de luxe peuvent accéder….un scandale!
Le 22@ et le parc de poblenou
Le parc Central de Poblenou a lui aussi subi les critiques du voisinage. Il est en effet entouré par les grandes tours modernes du nouveau quartier technologique 22@ qui s’est construit au détriment d’ateliers d’artistes et de logement sociaux. Les universités privées, les centres de recherche, de formation et d’échanges n’ont pas attiré la population escomptée, à cause de la crise financière (2007-2014).
Une lutte organisée pour la protection du patrimoine industriel de la ville à été menée par différents collectifs du quartier, afin, entre autre, de conserver l’aujourd’hui disparu Can Ricart. L’enceinte principale du complexe industriel de Can Ricart a d’ailleurs brûlé, une nuit, sans faire de victimes…comme par hasard.
Le parc de Jean Nouvel a aussi été largement critiqué à cause du mur qui l’entoure et qui, selon les plaintes, lui donne un aspect carcéral et ne facilite pas son accès. De plus, Le parc a dévoyé une rue (Pere IV) , ce qui ne facilite pas la circulation.
Et puis….le temps passe. On oublie les critiques, les blessures se pansent et l’économie reprend. Aujourd’hui on admire ces deux parcs sans vraiment attacher d’importance aux nombreuses polémiques soulevées par leur création! Aujourd’hui, on traverse ces parcs et on profite de l’instant présent…sans vraiment savoir ce que le futur nous réserve!